NOTES SUR LA POSSESSION/APPARTENANCE
Prof. Ilie Minescu
Universitatea de Vest, Timişoara
La relation d’interdépendance exprimée par le possessif a une structure variable selon le type de combinaison syntagmatique qui relie les deux éléments. Dans la Grammaire du sens et de l’expression, Patrick Charaudeau fait la distinction entre la structure de type AVOIR (relation d’appartenance) et la structure du type FAIRE (relation d’actance), chacune se subdivisant, selon la nature sémantique du lien qui unit les deux éléments.
A. Structure du type AVOIR
Ce type de structure se caractérise par un processus d’attribution d’un élément à un pôle de référence dont le résultat dépend du lien sémantique qui les relie: lien de nature, lien d’appropriation, lien social, lien d’affect, lien de caractérisation:
1). Le lien de nature
Il correspond au cas où l’élément dépendant, représenté toujours par un être non- humain, est une partie composante du pôle de référence qui peut être:
- humain: Ta peau est très fine correspond à: La peau de toi est très fine/Tu as une peau très fine. Le caractère humain du pôle de référence peut se trouver dans les mots qui représentent des institutions et des collectivités: Ses membres sont tenus de respecter le règlement correspond à: Les membres de l’association X/ L’association X se compose de membres qui sont tenus de respecter le règlement.
- non humain: Ses pieds sont torsadés correspond à: Les pieds de la table de salle sont torsadés/La table de salle à manger a des pieds torsadés.
2). Le lien d’appropriation
Il correspond au cas où l’élément dépendant, toujours non humain, est rattaché au pôle de référence soit par un acte d’acquisition de celui-ci soit par tout autre activité qui témoigne d’une relation stable entre les deux éléments, un rapport d’extériorité l’un vis-à-vis de l’autre. Leur lien n’est que le résultat d’une appropriation. Ainsi ″mon livre″ peut correspondre à: ″le livre que j’ai acheté où que j’écris″. ″Son cadeau″ peut correspondre à: ″le cadeau qu’il à offert où qu’il à reçu″.
3). Le lien social
Il correspond au cas où l’élément dépendant, toujours humain, est rattaché au pôle de référence soit par un lien de parenté soit par tout activité qui témoigne d’une relation stable entre les deux éléments. Le lien de parenté implique une certaine symétrie: S’il est mon frère, je suis son frère. Il est ton père, tu es son fils.
Autres relations sociales et professionnelles peuvent impliquer une hiérarchie: son patron (le patron qui le dirige), votre professeur (le professeur qui vous fait la classe).
4). Le lien d’affect
Il correspond au cas où l’élément dépendant représente une caractéristique abstraite inhérente à la personne, pôle de référence toujours être humain. Cette caractéristique, plus ou moins permanente, peut représenter des sentiments, des idées, des mouvements psychologiques, des états d’âme, des maladies ou affections diverses: Que ma joie demeure! ou Sa blessure lui fait mal périodiquement.
5). Le lien de caractérisation
Correspond à tous les autres types de caractéristiques abstraites qui ne constituent pas la partie d’un tout, mais un des aspects particuliers (la forme, la fonction, l’essence, le type d’appartenance, etc.) du pôle de référence. Celui-ci peut représenter un être humain (Son style est particulièrement heurté.) ou un être non humain (Sa forme est aussi soignée que son contenu – la forme et le contenu d’un livre).
B. Structure de type FAIRE
Elle se caractérise d’abord par un processus de nominalisation de l’action, puis par le fait que cette entité nominalisée, qui constitue l’élément dépendant, est rapportée à la personne, pôle de référence, impliquée dans cette action:
Ex. Francis lit lentement. – Sa lecture est lente.
L’action nominalisée est rapportée à l’agent soit pour souligner la manière de faire (Sa danse est très lascive.), soit pour souligner le résultat du faire (Sa venue a laissé tout le monde indifférent.).
L’action nominalisée est rapportée au patient humain qui a subi l’action soit pour souligner la manière de faire ( Mon licenciement a traîné en longueur – on m’a licencie avec lenteur.), soit pour souligner le résultat du faire (Son assassinat a défrayé la chronique – le fait de l’assassinat).
Les ressources dont dispose le français pour exprimer le rapport de possession peuvent être réductibles à un schéma canonique qui implique un verbe de possession et deux arguments, un possesseur et un objet possédé.
En effet la possession fait partie d’un ensemble beaucoup plus complexe de valeurs sémantiques, difficile à différentier: appartenance, inclusion, attribution, identification. Ces valeurs sont souvent exprimez dans les langues par des syntagmes assez proches qui font appel à être et avoir. En particulier, à coté du verbe avoir on pourrait utiliser son synonyme posséder et sa variante diathétique appartenir.
Pour mieux comprendre le concept de la possession il faut d’abord connaître la relation d’appartenance, qui est un concept plus général et complexe qui ne dispose pas des marqueurs spécifiques - selon les grammairiens traditionalistes - où qui, selon les grammairiens modernes, n’est propre qu’à un ensemble très restreint des constructions possessives: les syntagmes nominaux constitués par des noms tels que possesseur, propriétaire, propriété, possession, appartenance.
La relation d’appartenance exprimée dans le syntagme ″Le vélo de mon voisin″ propose l’existence de deux entités: un possesseur et un objet possédé - où le possesseur sert à repérer la notion de vélo. En effet, la relation d’appartenance renvoie à deux types d’opérations distinctes. L’un correspond à une opération de rattachement et établit le rattachement d’un objet à son possesseur. L’autre correspond contrairement à une opération de détachement mais la relation ne s’établit plus entre un objet et son possesseur mais entre un fragment en voie de constitution et le contexte dont on cherche à le dégager. En ce cas la relation d’appartenance permet de préciser les contours d’une partie qui tend à se dissocier d’un tout (ce n’est pas un vélo quelconque, c’est le vélo de mon voisin).
La difficulté réside justement dans la multitude d’ interprétations qu’on peut donner à cette relation. Par exemple, Guy Serbat en Linguistique latine et linguistique générale souligne que l’expression mon voisin met en fait en évidence un contexte discursif complexe, celui de l’univers de mon voisin, dont on peut détacher une composante particulière, le vélo. La relation d’appartenance exprime donc une autonomisation d’un fragment, détaché de son tout de référence.
Il y à des cas où la relation d’appartenance n’est ni détermination, ni détachement. Dans un syntagme tel que ″le lit de Denise″ on peut dire que l’expression lit est déterminée par la mention de son possesseur Denise. Mais si l’on pense au contexte réel de la situation en cause on se rend compte qu’il ne faut pas gloser ″le lit de Denise″ par ″le lit appartient à Denise″, mais par ″le lit ou Denise à dormi″. L’objet possédé fonctionne ici comme l’indice d’une infinie variété de contextes possibles, pendant que la notion du prétendu possesseur Denise permet de sélectionner l’un de ces contextes. Ce n’est plus la mention du possesseur qui crée l’évocation des contextes possibles, mais celle de l’objet censément possédé. Comme la relation d’appartenance ne prend pas de marqueurs spécifiques, la diversité des langues et des points de vue théoriques fait apparaître certains chevauchements avec d’autres relations de logique naturelle.
On peut en effet affirmer que la relation d’appartenance se ramifie selon deux types différents: le détachement où bien la détermination et que le détachement constitue une sorte de généralisation de la possession inaliénable où de la relation partie - tout tandis que la détermination peut se confondre avec la possession inaliénable.
Bibliografie:
Faits de langue, La relation d’appartenance, vol. 7, 1996
Guy Serbat, Linguistique latine et linguistique générale, Institut de Linguistique de Louvain, 1988
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